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Dring !!! Cette fois, l’interphone émet un son bizarre ! Céline sursaute ! Elle s’attend à la visite mais malgré tout, ses tremblements vont crescendo, le reflet de son visage sur le miroir d’entrée lui renvoie une lividité d’outre-tombe. Gorge sèche, elle appuie sur l’ouverture sans même regarder l’écran, ouvre la porte, entend le « vlan » de l’ascenseur s’élever, son corps frissonne ! Elle en a connu des situations complexes ; celle-là n’est pas banale. Des pas énergiques et sportifs arrivent et LA SILHOUETTE encadre la porte…

Dix-huit ans plus tôt

– Dépêche Céline ! on va être à la bourre. J’veux rien rater de la fête, moi ! s’écrit Alex du haut de ses un mètre quatre-vingt, belle gueule « bcbg », yeux vifs vert-amande, coiffé avec des tonnes de gel scintillant dans ses cheveux bruns.

– Yes ! J’arrive ! Descendant gracilement les marches d’un sourire étincelant, elle resplendit dans sa robe stretch à strasse, ses sublimes cheveux longs tirant sur le blond font ressortir son bronzage niçois.

– Permission jusqu’à 3 h du matin maxi ! Te rappelle que ta sœur n’est pas majeure ! s’écrient les parents en regardant filer les deux complices la main délicate d’Alex posée sur l’épaule de sa sœur en geste protecteur.

La fête battait son plein sur les hauteurs du quartier Mont-Boron. De la somptueuse villa style napoléonien les lumières psychédéliques jetaient leurs faisceaux dans le ciel bleu nuit et la musique électro faisait écho aux verres s’entrechoquant. Leurs amis retrouvés, Max l’organisateur et ami, Elodie et toute la « clic » déjà bien défoncés les entrainèrent dans les méandres de la fête. Des heures plus tard, Céline enivrée de shot, de cocktails et « pastilles » se retira, titubant vers l’étage en s’affaissant dans un lit où elle sombra dans les limbes de l’inconscient et sentit à peine, surgit de nulle part, la caresse veloutée d’une main balafrée.

Quatre mois avaient passé depuis, et la tête de déterrée qui se reflétait dans le miroir de la salle de bain n’était pas à la fête ! Le test « positif » en main lui fit jaillir des larmes de perdition. D’un rapide calcul, Céline comprit vite : pas de menstruations depuis cette fameuse fête.

– Qu’ai-je fais ?  Je ne me souviens de rien ! dit-elle à sa mère dans un état honteux de confidences obligées.

A partir de ce moment, elle ne maitrisa plus rien. Ses décisions ne lui appartenaient presque plus et sa mère organisa sous une autorité décuplée par la honte, son transfert en province où elle termina sa grossesse en accouchant anonymement dans une clinique de campagne, tout en continuant ses études par correspondance.

Elles sont là face à face, une dans l’encadrement de la porte portant short, teeshirt avec une inscription engagée et des godillots, cherchant dans le regard de l’autre l’étincelle d’une filiation, et Céline caraco beige et Chino noir en retrait sous le l’halogène du couloir, bras ballants, dévisageant d’un regard prudent cette brune surgit d’un lointain passé effacé.

-Bonjour ! jaillit spontanément des deux côtés.

Ce sourire de connivence permit de dégeler ce premier contact et s’asseyant de part et d’autre du canapé face à la baie vitrée avec vue sur le Sacré-Cœur sous un soleil d’été, tout en imprimant dans sa mémoire chaque détail de cette pièce de vie aux odeurs florales, Julie se lança :

– D’abord MERCI d’avoir permis cette première rencontre. C’était important de retrouver ma mère biologique, mes racines !

Puis Julie révèle qu’elle est très heureuse avec sa famille d’adoption. Ils vivent aux Etats-Unis depuis huit ans maintenant, et sa vie sans tabou et ni contrainte lui permet de s’exprimer librement dans la création artistique de ses toiles. Céline attentive écoute avec grand intérêt le passé de cette jeune fille dynamique et franche, qu’elle n’a jamais élevée et appréhende le moment où inévitablement elle devra rendre des comptes sur la décision impitoyable qu’elle a pris ce jour-là pour le devenir de ce nouveau-né.

Depuis quelques secondes Julie a cessé de parler et son regard, en recherche de réponses, fixe avidement celui de »sa mère » tel un fil de funambule à l’approche de révélations tant attendues. Alors Céline raconte sa fameuse soirée avec son frère et ses amis, la grossesse, l’exclusion, l’accouchement. Puis elle poursuivit en disant :

– Je comprends parfaitement ta démarche, car je suis moi-même confrontée dans mon métier de journaliste à la traque de la vérité ! A l’époque je n’étais pas maître de toutes mes décisions, il y a une chose que je voulais absolument… silence.. Céline émue, larmes aux bords des yeux, revoit la scène où elle écrit cette lettre pour l’enfant qui la lira ou pas puis la glisser sous pli fermé avec son porte-bonheur préféré.

– C’est celui-là ? dit Julie en tendant délicatement un fin bracelet or avec le prénom gravé CELINE.

Elle lui fait un oui en hochant la tête émue. Céline le sent cette jeune fille a besoin d’autres réponses…

– Je voulais te remercier d’avoir accepté ma demande d’accès à mes origines par l’intermédiaire du CNAOP qui m’a permis d’avoir cette lettre et te retrouver. Mais qui est mon père ? La question fuse.

– Je ne sais pas, mais je me souviens, avant de sombrer, avoir ressenti une tendre caresse, puis ce fut le néant. Lui révéla sa mère.

Julie réfléchit puis habilement lui suggère de tenter l’hypnose. Elle lui raconte que dans son pays cela se pratique assez souvent.

Quelques semaines ont passé. Céline, demi-assise, visage concentré, les yeux mi-clos, en léthargie, recherche dans les méandres de sa mémoire refoulée, au son de la voix hypnotique de l’hypnothérapeute de renom, un indice voire une révélation ! Soudain, le déclic ! Cette voix douce, cette silhouette floue auréolée de cheveux bruns se penchant sur le sien, lui révèle les contours d’un visage connu puis cette main douce marquée d’une cicatrice….

Un cri jaillit  : – ALEX !

. CNAOP : Conseil national d’accès aux origines personnelles

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